Présentation du numéro
La science et l’État de droit sont des conditions de possibilité de la psychanalyse. Mais elle est menacée quand la science devient pure protocole statistique et/ou quand l’État de droit est menacé par les populismes.
Dans ce numéro, des analystes échangent avec des représentants d’autres disciplines sur la montée des populismes en Europe. D’autres témoignent des conséquences d’une analyse menée jusqu’à son terme sur leur engagement dans la société, interrogent la notion de garantie en psychanalyse, et élaborent, à partir de leur pratique, ce qu’il en est de la place du symptôme dans notre société.
- Sur la montée des populismes en Europe
- Qu’est-ce que la politique en psychanalyse ?
- Qu’est-ce qu’une politique du symptôme ?
- Y a-t-il une garantie en psychanalyse ?
Quarto no 117 – DROIT DE CITÉ DU SYMPTÔME
HOMMAGE A SERGE COTTET
ÉDITORIAL
Guy Poblome
PSYCHANALYSE DANS LA CITE
Christiane Alberti : De l’urgence de définir l’incidence politique de la psychanalyse
L’incomparable
Dominique Holvoet : Du plaisir de l’action juste
Véronique Voruz : L’os et la chair de la politique
Patricia Bosquin-Caroz : Émergences incomparables
Anne Lysy : Quand l’incomparable se produit, évident et opaque
Laurent Dupont : Cogner sur l’autre
Daniel Pasqualin : Disparaître ?
Entre discours de l’analyste et discours du maître
Jacques-Alain Miller : Propos sur la garantie
Serge Cottet : La psychanalyse SGDG (sans garantie du gouvernement)
Philippe De Georges : De la garantie qu’il n’y a pas
Marie-Hélène Brousse : Réalisme
Éric Zuliani : L’idéologie du conditionnement universel
Philippe La Sagna : Qu’est-ce qui permet une pratique sans protocole ?
Éric Laurent : Le grand remplacement clinique
FORUM EUROPEEN SCALP
Alexandre Stevens : Ouverture
Jean-Daniel Matet : Introduction
Michel Gheude : La bénédiction de Babel
Patricia Bosquin-Caroz : Retour de Lampedusa
Ico Maly : Nationalisme versus les Lumières
Jelle Versieren : L’hégémonie et la n-va
Antoine Cahen : D’une certaine inhibition dans la défense de l’État de droit en Europe
Antonio Di Ciaccia : En défense de la démocratie
Miquel Bassols : « But let me say one thing… »
ÉCHO
Laura Sokolowsky : Totalitarisme et psychanalyse : petit voyage au pays de l’Allemagne nazie
LA POLITIQUE DU SYMPTOME
Céline Danloy : Camille, unique en son genre
Katty Langelez-Stevens : Il y a clinique et clinique
Glenn Strubbe : Quand 1+1 ne font plus 3
Ben Verzele : De la persécution au clash
ENSEIGNEMENTS DE LA PASSE
Dominique Holvoet : Qu’en est-il de l’inconscient à la fin d’une analyse ?
LIRE LACAN
« Radiophonie »
Véronique Voruz : Questions III et IV
Éditorial
L’émergence du discours de la science est la condition d’existence de la psychanalyse. Mais quand le scientisme, la quantification, l’évaluation, les statistiques, la randomisation, le big data, le pragmatisme empirique deviennent l’empire du chiffre, la psychanalyse est en danger et risque d’être écrasée par la bureaucratie sanitaire.
L’État de droit est également une condition de l’existence de la psychanalyse en tant qu’il garantit la liberté de la parole. Mais quand les discours populistes et nationalistes, voire extrémistes, prônant une langue univoque, gagnent du terrain comme c’est le cas aujourd’hui dans nombre de nos « démocraties », la psychanalyse encourt un danger encore plus grand. Et quand le politique tente « de condamner et d’interdire » la psychanalyse – même si ce n’est pour le moment que pour le traitement de l’autisme –, elle est directement menacée.
L’Autre méchant pour la psychanalyse est constitué et localisé. Il a été dépiauté lors de la Journée Question d’École de janvier 2017 sur la Psychanalyse dans la cité comme à l’occasion du Forum européen scalp (Série des Conversations Anti-Le Pen initiée par Jacques-Alain Miller) de Bruxelles en avril de la même année. Pourtant, Lacan avertissait que si la psychanalyse devait disparaître un jour, la responsabilité en incomberait aux psychanalystes eux-mêmes. Dès lors, que faire ?
Ni révolution, ni progrès, dit Lacan, mais subversion, pour donner au symptôme son Droit de cité. Il y a en effet une Politique du symptôme, véritable « question subjective en acte », singulière, incomparable, incommensurable, qui tient aux modalités du rapport du parlêtre à la jouissance, à la pulsion, aux objets a. Les praticiens de la psychanalyse le démontrent au un par un. Les quatre cas cliniques, suivis de leur discussion détaillée, présentés lors de la Journée clinique de l’ACF-Belgique et du Kring van de NLS en donnent le témoignage.
Les Enseignements de la passe, par lesquels chaque ae transmet ce qu’il en est de la politique de son symptôme pour celui qui a mené l’expérience analytique jusqu’à son terme, nous montrent comment chacun est parvenu à ne pas céder de la bonne façon, à échouer à éradiquer le symptôme de la bonne manière, permettant l’émergence d’un désir inédit pour l’action dans la cité qui permette le maintien de la « difficile liberté » inscrite dans la langue.
Sans doute est-il conseillé de Lire Lacan à la façon dont Jacques-Alain Miller nous indique de « lire un symptôme ». Cette rubrique, qu’il proposait, lors de la dernière Assemblée générale de l’École de la Cause freudienne, de déployer dans nos communautés de travail du fait que Lacan n’était plus lu dans les universités, propose dans ce numéro un commentaire du texte « Radiophonie ». On y trouve quelques pépites. Si la formule de Lacan « l’inconscient, c’est la politique » est presque devenue un slogan, en déduire que « l’inconscient, ce n’est pas la psychanalyse » fait surprise !
Alors, avis aux curieux, et bonne lecture !
Guy Poblome