Le collectionneur et l’avare. Ils semblent les négatifs l’un de l’autre. D’un côté la dépense en pure perte, de l’autre la rétention parcimonieuse. Jadis la magnificence de l’un brillait de l’éclat de la vertu, quand la cupidité de l’autre avait toutes les laideurs du péché. Le capitalisme a redistribué les cartes de la vertu et du péché. Le collectionneur traîne aujourd’hui un parfum de scandale, et le caractère économe et regardant a été élevé en mérite.
En même temps, la tentation semble grande d’accoler collection et accumulation, de marier le collectionneur au thésaurisateur. Il est urgent de les disjoindre. Quelque chose pousse l’un au sans compter et l’autre au compte scrupuleux. Quoi ? Pour le comprendre, on propose ici d’examiner de près les mécanismes intimes qui animent ces figures opposées du désir, la collection et l’avarice.
Ecrivain, psychanalyste et membre de l’Ecole de la Cause freudienne, Gérard Wajcman enseigne au département de psychanalyse de l’Université Paris 8. Il dirige le Centre d’étude d’histoire et de théorie du regard.