La lucidité de l’éthique
Quel type de relève pour la métaphysique l’éthique envisagée comme « philosophie première » propose-t-elle ? La phénoménologie peut-elle ressaisir le fondement de tout phénomène, obéir à une démarche encore transcendantale tout en destituant l’ego de sa principialité sans cesse reconduite depuis Descartes ? La requalification des catégories théologiques imposée par la distance de l’autrement qu’être peut-elle laisser inchangé le nom même de Dieu auquel elle nous ordonne comme à notre définitive tâche ? Ces questions, Levinas aura contribué à les formaliser et à en imposer l’urgence avec une radicalité à nulle autre pareille. Cet ouvrage se propose d’en éclairer quelques unes à partir d’analyses génétiques de sa pensée, de confrontations avec quelques hautes figures de la tradition philosophique (Husserl et Heidegger, mais aussi Descartes, Spinoza, Derrida, etc.) et de la réactivation de quaestiones disputatae lourdes d’enjeux. Car l’éthique dispense une lumière propre, sans laquelle nombre de questions nous resteraient durablement insoupçonnées ; cette lumière elle-même doit être décomposée et se prêter à analyse. Lumière jetée par l’éthique, lumière jetée sur l’éthique : telle est, en son double génitif, la lucidité de l’éthique.