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Le désir de Lacan

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Présentation

Il y a quarante ans, Lacan nous quittait. Il nous laisse un héritage dont nous n’avons pas fait le tour.

Ce volume s’ouvre sur la leçon inaugurale de l’année 1974-1975 de son Séminaire inédit, « RSI ».

En filigrane de ce texte, une question s’y lit, celle du désir de Lacan, d’un Lacan d’une grande actualité.

Ce qu’il enseignait hier dans son séminaire surgit aujourd’hui dans nos sociétés : la chute du père, la poussée du religieux, la montée du racisme, les identités transgenres…

Sa quête incessante du réel ne nous laisse nullement en paix. Du symptôme déplié par Freud, il arrive au sinthome, au plus réel de ce qui fait le parlêtre.

De Freud, Lacan disait qu’il était un homme de désir, d’un désir qu’il a suivi contre son gré mais sur lequel il n’a pas cédé.

Et le désir de Lacan ?

Vingt et une personnes, analystes ou pas, nous en donnent ici leur version.

Point fort

  • Inédit de Lacan : Jour de Grève, 1ère leçon du séminaire RSI

Préface

Au moment où je bouclais le centième numéro de Quarto qui célébrait le trentième anniversaire de la mort de Lacan, je demandais à Jacques-Alain Miller un texte inédit de celui-ci.

À ma plus grande surprise, il m’envoya la première leçon d’un Séminaire inédit, « RSI ». Son titre, « Jour de grève ».

Je lus le texte, je le relus…

Que signifiait ce choix ? Pourquoi ce court texte sur la grève – saisie par Lacan comme un symptôme –, sur la question de savoir si un analyste peut se comporter comme un imbécile et sur les non-dupes ? Je restais perplexe.

J’avais invité quelques collègues, jeunes et moins jeunes à écrire quelques lignes sur le désir de Lacan.

La formule – le désir de Lacan – est équivoque. Est-ce à dire, le désir qui habite Lacan ? Ou le désir que ses élèves lui portent ? L’un et l’autre sont énigmatiques.

Aujourd’hui, au moment de la publication de ce livre dans les nouvelles Presses Psychanalytiques de Paris, je me suis demandé si ce texte, « Jour de grève », ne vient pas interpréter le Che vuoi de Lacan.

Plusieurs pistes s’y déploient.

Une première, celle du non-dupe qui se situe à l’envers de l’éthique de la psychanalyse telle que Lacan l’a enseignée au début des années soixante. Le non-dupe se trouve en passe d’errer à ne pas jouer le jeu d’un discours.

Une deuxième rapproche le non-dupe de l’imbécile. Lacan nous rappelle que si l’analyse est un remède contre l’ignorance, elle est sans effet contre la connerie. Et il se pose la question de savoir si un analyste peut se comporter comme un imbécile !

Avant de déplier la troisième et dernière piste, je vous livre ce que j’aperçois entre les lignes de ce texte. Il s’agit d’une question centrale pour ses élèves.

Lacan désirait une École qui ne soit pas engluée dans les lourdeurs de la bureaucratie, du bien-être, de la massification, de l’effet de colle propre à tout groupe.

L’École voulue par Lacan me paraît devoir répondre au trou, au vide qui la centre. Elle est affine au S(A/), au signifiant du manque dans l’Autre.

C’est la raison pour laquelle, Lacan annonce dans cette leçon d’ouverture de l’année 1974-1975 qu’il aspire à une « École où il s’agit, en somme, que chacun apporte sa pierre au discours analytique en témoignant de comment on y entre [1] ». Il rappelle alors que la procédure de la passe en est une modalité.

Lacan se demande si l’analyste peut être considéré comme un élément. Il l’interroge par le bout de l’identité de soi à soi. S’il est un élément, alors, peut-il faire ensemble ?

La question est cruciale, car l’École telle qu’il la désirait est un pari jamais gagné une fois pour toutes. Lacan voulait une École réveillée, composée de Uns non identifiés l’un à l’autre, réunissant des épars, des singuliers, des extraordinaires, des excentriques, des insolites, des extravagants, des rares, des drôles, des a-normaux…

Alors le désir de Lacan ! Où se loge-t-il ?

Ce sera ma troisième piste. Un indice nous est donné au début du texte.

« J’arriverai peut-être cette année, nous dit Lacan, à vous en convaincre, – le symptôme c’est du réel pour se référer à une de mes trois catégories. [1] »

Tout son dernier enseignement s’indexe de la catégorie du réel. N’est-ce pas là que s’origine sa faculté d’anticiper les grands phénomènes de la société ?

Ainsi, quarante ans après sa mort, nous sommes surpris par sa préscience extraordinaire de ce qui se développe aujourd’hui dans nos sociétés contemporaines. Citons, entre autres, la disparition du règne du père annoncée déjà dans « Les complexes familiaux », et la montée du racisme dès les années soixante. Ou encore le mouvement transgenre qui ne cesse de prendre de l’ampleur aujourd’hui. Il l’avait anticipé en démontrant que ni l’homme, ni la femme ne naissent au départ identifié à leur sexe !

« Lacan croyait au réel, au point de déclarer un jour que c’était là son symptôme. Il en souffrait sans doute et lui sacrifiait tout. […] Au regard de ce réel sans visage et « sans loi », la science elle-même lui paraissait futile. Quant à la psychanalyse, elle n’était pour lui que la meilleure façon de s’en arranger. [2] »

Le désir de Lacan, jamais ne pourra être mis à nu complètement ! Ce désir, il nous fait courir, il nous met au travail, il ne cesse de nous réveiller, il nous intranquillise, il nous décharite

Ce désir, si fort, n’est-il pas cause de notre amour pour Lacan ?

Bruno de Halleux

[1] Lacan J., Jour de Grève, 1ère leçon du séminaire RSI, dans ce volume, p. 7

[2] Jacques-Alain Miller, Un début dans la vie, Edition Gallimard, Le promeneur, 2002, p. IX.

Poids 0.200 kg
Éditeur

Date de publication

Septembre 2021

Nombre de pages

65

EAN

9782374710402

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