La psychose n’est pas une pathologie chronique, déficitaire et handicapante. Aucune étude n’est parvenue à le démontrer, et pourtant ce point de vue est très répandu. En reconnaissant que les symptômes sont déjà une réponse au malaise, la psychanalyse permet aux sujets qu’elle accueille d’infléchir le cours de leur vie. En découle une pratique qui, plutôt que de viser l’éradication d’un trouble, accompagne les sujets dans leurs efforts d’élaboration de ces symptômes en une solution élégante. Moins attachée à la psychose, la clinique psychanalytique s’intéresse aux sujets psychotiques, seuls à même de dire ce qu’ils rencontrent et comment ils s’essaient à le traiter.
Cet ouvrage met ainsi à l’honneur les « bricolages » subjectifs, à travers une série d’exemples cliniques, articulés aux élaborations lacaniennes, et mis en perspective avec certaines découvertes de la psychiatrie classique. Les travaux issus du repérage des « psychoses ordinaires » ne promeuvent pas un nouveau type clinique, ils permettent de penser les modalités de rétablissement (suppléances, compensations…) dans leur nature dynamique. Ici, les élaborations d’enfants et d’adolescents sont considérées avec le même sérieux que celles d’adultes pour démontrer que le traitement de la jouissance auquel s’affaire le sujet psychotique n’est pas lié à une « marche naturelle de la maladie », mais à une progression logique vers une solution élégante. L’accent est porté sur la nature inventive du symptôme et une éthique supposant l’accueil du sujet.
Avec une préface de Sophie Marret-Maleval et une postface de Gwénola Druel
Mickaël Peoc’h est psychologue clinicien en institutions médico-sociales et en cabinet, docteur en psychopathologie et chargé de cours en psychologie à l’université Rennes 2. Il est également psychanalyste.
TABLE DES MATIÈRES Préface de Sophie Marret-Maleval . Introduction . Première partie : Compensations, suppléances, sinthome et nom, essai de définition Chapitre I Compensations et suppléances . Compenser et suppléer dans l’enseignement lacanien . Compenser la psychose dans l’enseignement lacanien . Usage lacanien du signifiant « Suppléer » . Des définitions qui s’entrecroisent .
Propositions pour une utilisation définie des termes de compensation et de suppléance . Agrafe et tenant-lieu . Complexité d’une solution supplétive . Précarité relative . La psychose non-déclenchable .
Chapitre II N’hommination et sinthomatisation . Se faire un nom pour s’en servir . Fonction du nom dans la conception de Lacan . « Il faudrait écrire n’hommer » (Lacan Jacques, Le séminaire, livre XXII, R.S.I., leçon du 15 avril 1975, inédit) . La n’hommination, une dynamique subjective . Une clinique de la n’hommination : roman et vie d’une fausse princesse .
Le sinthome ou le symptôme solution . Sinthome comme quart élément . Sinthome et suppléance . Sinthome et nom de jouissance . Sinthomatisation . Deuxième partie : « Cartographie » clinique des solutions subjectives Vers une clinique des élaborations . Chapitre III Diversité des modes d’appropriation du corps . Le corps à partir de l’image . L’organisme et son voile . L’image fixant le corps . David : du corps troué au fantôme et du fantôme au clown . Corps signifiant . Le pousse-à-la-femme dans la psychose, une réponse à l’inexistence du rapport sexuel . S’excepter au(x) genre(s) humain . Écrire sur son corps . Le corps réellement attrapé . L’amputation réelle du corps . Extraction de jouissance par la fatigue ou la privation . Appropriation du corps par la douleur . Chapitre IV Boussole(s) singulière(s) . Orientation sur l’autre . L’orientation comme si . Trouver son dynamisme sur l’autre . L’analyste boussole . Jules : labilité des orientations à partir d’un autre . Copiage d’une norme sociale . Réaliser le programme . Suridentifications . Le cas Jonas : la jouissance mobilisée par le rôle . Fantasmes, fanatismes . Images indélébiles . Mythomanie et localisation de jouissance . Fanatismes idéologiques . Chapitre V Le langage, la langue, l’écrit . Production de signification . Le délire comme solution . Le délire, production d’un point d’où dire . Claude Vorhillon, messager de Elohim . Le traitement de la langue . Mettre le son aux commandes . Coder le langage . Un fanatique de la communication, le professeur Warwick . L’écrit, la lettre et la poubellication . La lettre godet de jouissance . Poubellication . Gwenaël : l’écrit pour traduire et supporter le désir de l’Autre . Schizozen libre . Perspectives : vers une solution plurielle . Troisième partie Élaboration progressive de suppléances : clinique des solutions élégantes
Chapitre VI Jean-Marie Déguignet : se faire un nom à la lettre .
Éléments d’anamnèse tirés de son autobiographie . Naissance en Bretagne . Le temps du militaire . Premier engagement . Deuxième engagement . Le temps du père de famille . Le temps de l’écrivain, du stoïcien .
L’élaboration de diverses solutions au cours de sa vie . Signe du miroir et traitement de l’image du corps . Une boussole idéologique . La jouissance prise au signifiant . Un délire producteur de sens . Usage du français pour contrer lalangue . L’écrit godet de jouissance . Se faire philosophe et voir son nom briller . Une identification imaginaire réussie : stoïcien . Cession de jouissance et concession dialectique . « Tu es… », une nomination .
Chapitre VII Adam : de pirate à Jedi . Compensations symptomatiques au début du traitement . Une position d’exception coûteuse . Le signe du miroir et le costume nécessaire . Une forme particulière de maniérisme .
De pirate . L’imaginaire comme recours . L’effraction pubertaire . L’adolescent enseignant .
À Jedi . Une identification qui capte la jouissance . Un nouveau lien social . L’invention d’une paraphrénie discrète .
Conclusions et ouvertures .
Postface de Gwénola Druel .
Bibliographie . |